La Querelle des Anciens et des Modernes

Controverse sur les mérites respectifs des écrivains de l’Antiquité et de ceux du siècle du Louis XIV, qui divisa le monde littéraire français à partir des années 1670. Elle reprend un débat déjà agité au XVIe siècle, celui qui oppose les imitateurs des Anciens à ceux qui prônent le rejet des modèles antiques et l’invention de formes modernes. Suivant l’exemple de Descartes et de Pascal, les Modernes (Perrault, Quinault, Saint-Évremond, Fontenelle, Houdar de La Motte) critiquent l’Antiquité parce qu’ils contestent le principe d’autorité, en raison du progrès des techniques et des sciences, et en raison de l’ennui que les auteurs anciens peuvent susciter auprès d’un public mondain et féminin : la permanence des lois de la nature interdit, selon eux, de considérer les Modernes comme inférieurs à leurs ancêtres. Les Anciens (BoileauRacineBossuetLa BruyèreLa Fontaine) ne peuvent répondre sur le terrain de la théorie, mais invoquent le génie des écrivains antiques, d’Homère et de Virgile, pour expliquer qu’ils doivent rester des modèles dans la pratique des arts. Cette querelle se déroula en trois étapes principales. Dans la première, le débat portait sur l’épopée et le poème héroïques. Boileau, dans son Art poétique (1674), condamnait les tentatives  de création d’une épopée nationale, faisant appel au merveilleux chrétien, préconisant le respect des modèles grecs et latins, le recours à la mythologie. La querelle s’élargit à la question de l’emploi du français au lieu du latin dans les inscriptions. La deuxième étape, la plus importante, commença en 1687, avec le poème que Charles Perrault présenta à l’Académie: le Siècle de Louis le Grand critique les Anciens, fait l’éloge des contemporains, proclame le siècle de Louis XIV supérieur à celui d’Auguste. Boileau s’indigna et attaqua, soutenu par La Bruyère. Les Modernes exposèrent leurs thèses dans la revue le Mercure galant. Arnauld réconcilia les adversaires dans les dernières années du siècle. Vingt ans plus tard, la querelle reprit, à propos de la traduction d’Homère en prose par Mme Dacier, que La Motte adapta en vers, supprimant ce qu’il appellait des longueurs pour adapter l’Iliade aux goûts modernes. Cette fois-ci, l’apaisement vint de Fontenelle. Bien plus que le faux problème de la supériorité, cette querelle posait la question du progrès et de la naissance d’idées nouvelles, soutenues par une nouvelle esthétique.