Dramaturge français, historiographe de Louis XIV;, qui fut le représentant le plus emblématique de la tragédie classique française.
Une éducation janséniste
Les débuts littéraires
La querelle avec les jansénistes
Les grandes tragédies
Les dernières années
Né le 21 ou le 22 décembre 1639, Racine était le fils d’un greffier de la Ferté-Millon. Orphelin à l’âge de trois ans, il fut recueilli par sa grand-mère paternelle. En 1649 — Racine a alors dix ans —, cette dernière confia son éducation à une institution sans égale au XVIIe siècle, les Petites Écoles du monastère de Port-Royal. Tenues par les religieux et les «!solitaires!» du couvent de Port-Royal, ces écoles se distinguaient par la qualité et la «!modernité!» de leur enseignement. En effet, elles proposaient l’étude du grec et du français, quand les autres établissements, notamment ceux des jésuites, se bornaient à enseigner le latin à leurs élèves. Elles favorisaient en outre l’étude des langues étrangères et la lecture de textes intégraux — et non pas seulement d’extraits comme c’était alors le cas dans la majorité des collèges. Racine garda de cet enseignement une solide culture classique, et en particulier une bonne connaissance des tragiques grecs (Eschyle, Sophocle, et surtout Euripide), qui furent pour son théâtre des modèles et des sources d’inspiration.
Le jeune étudiant fit ses débuts littéraires en composant des poèmes classiques d’inspiration profane (Ode à la nymphe de la Seine, 1660), qui furent remarqués par Chapelain, grand maître d’œuvre de la politique de Louis XIV en matière de littérature, et obtinrent un certain succès. Protégé par son oncle, vicaire général de l’évêque d’Uzès, Racine briguait un bénéfice ecclésiastique, qui ne lui fut pas accordé. Il revint alors à Paris pour se consacrer à la littérature. Après avoir écrit une Ode sur la convalescence du roi (1663) afin de s’attirer les faveurs du monarque, il fit représenter au Palais-Royal par la troupe de Molière sa première tragédie, la Thébaïde ou les Frères ennemis (1664), et l’année suivante, Alexandre le Grand, qui lui apporta le succès. Cependant, mécontent de la mise en scène de cette dernière pièce, il la retira à Molière pour la confier à une troupe rivale, celle de l’hôtel de Bourgogne, qui devait ensuite jouer toutes ses grandes tragédies. Ces deux premières pièces furent éditées très vite, ce qui témoigne du sens que Racine avait de sa carrière.
La querelle avec les jansénistes
En 1666, Pierre Nicole, qui avait été un des maîtres de Racine à Port-Royal, condamna avec vigueur le théâtre et les auteurs dramatiques dans un pamphlet intitulé les Hérésies imaginaires. Racine s’estima attaqué par cette diatribe, entra violemment en polémique avec ses anciens maîtres et les renia. La vision du monde qui se dégage de ses pièces n’en porte pas moins la marque de l’enseignement janséniste, et de sa conception pessimiste de l’Homme, soumis à la grâce divine et prisonnier d’un destin qui le dépasse.
Andromaque, en 1667, remporta un succès public qui égala celui qu’avait eu Corneille, trente ans plus tôt, avec le Cid. C’est pendant les dix années qui suivirent cette représentation d’Andromaque que Racine écrivit les pièces que l’on considère généralement comme ses chefs-d’œuvre. Il se forgea avec elles une réputation d’immense auteur tragique, qui ne devait plus se démentir et qui lui valut d’être élu à l’Académie française en 1673 (voir Institut de France).
Mais, à l’automne 1677, la carrière de Racine prit un tournant radical : sa dernière pièce, Phèdre, malgré son succès immense, fut attaquée violemment par ses ennemis qui dénoncèrent le caractère scandaleux de son intrigue. Sous l’influence de Madame de Maintenon, épouse du roi, la Cour évoluait alors, il est vrai, vers un rigorisme moral qui s’accordait mal avec l’art théâtral, traditionnellement jugé impie par l’Église. Soucieux de prendre ses distances avec le théâtre, Racine décida alors d’abandonner la scène. Il eut d’ailleurs bientôt l’honneur, en même temps que son ami Boileau, d’être nommé historiographe du roi, charge très honorifique et très lucrative. La même année, il se maria, se réconcilia avec les jansénistes et se mit à mener une vie de retraite et de piété, consacrant ses talents à son nouvel emploi.
Racine ne revint au théâtre qu’en 1689, avec Esther et en 1691, avec Athalie, deux pièces édifiantes d’inspiration biblique, écrites à la demande de Madame de Maintenon pour les élèves de l’institution religieuse de Saint-Cyr. Il composa encore, vraisemblablement en 1697 ou 1698, un Abrégé de l’histoire de Port-Royal (posthume, 1742-1767). La piété manifeste de sa vie après 1677 et ses interventions en faveur du monastère de Port-Royal lui valurent le sobriquet posthume d’«avocat de Port-Royal!». Il est d’ailleurs possible que sa fidélité à la pensée janséniste lui ait attiré quelque disgrâce. Louis XIV se trouva toutefois assez affecté par la mort du poète, survenue le 21 avril 1699, pour accéder au codicille de son testament et autoriser son inhumation dans le cimetière de Port-Royal-des-Champs.