Abstémius a fourni la trame de cette fable. Bien d’autres avant (et après) La Fontaine reprendront à leur compte le thème de la sagesse qui se vend. L’ idée originale est attribué à Cosme l’Ancien de Médicis (1389-1464). Le sujet était à la mode le roi se faisait accompagner de son fou et, en 1511, Erasme (1469-1536) écrira son « Eloge de la folie », une satire à caractère social dans laquelle il égratignera, entre autres, le clergé. La Fontaine ne se basera pas comme l’humaniste hollandais sur la sagesse des hommes qui est folie aux yeux de Dieu, selon Bible. Il partira du principe qu’un fou trouve toujours un plus fou qui l’admire et qui lui fait confiance. La Fontaine écrira une autre fable sur le même thème de « sagesse et folie » « Un Fou et un Sage » (Livre XII, fable 22).
Jamais auprès des fous ne te mets à portée :
Je ne te puis donner un plus sage conseil.
Il n’est enseignement pareil
A celui-là de fuir une tête éventée.
On en voit souvent dans les cours :
Le prince y prend plaisir ; car ils donnent toujours
Quelque trait aux fripons, aux sots, aux ridiculesUn fol allait criant par tous les carrefours
Qu’il vendait la sagesse, et les mortels crédules
De courir à l’achat ; chacun fut diligent.
On essuyait force grimaces ;
Puis on avait pour son argent
Avec un bon soufflet, un fil long de deux brasses.
La plupart s’en fâchaient ; mais que leur servait-il ?
C’étaient les plus moqués ; le mieux était de rire,
Ou de s’en aller, sans rien dire,
Avec son soufflet et son fil.
De chercher du sens à la chose,
On se fût fait siffler ainsi qu’un ignorant.
La raison est-elle garant
De ce que fait un fou ? Le hasard est la cause
De tout ce qui se passe en un cerveau blessé.
Du fil et du soufflet pourtant embarrassé,
Un des dupes un jour alla trouver un sage,
Qui, sans hésiter davantage,
Lui dit :« Ce sont ici hiéroglyphes tout purs.
Les gens bien conseillés, et qui voudront bien faire,
Entre eux et les gens fous mettront pour l’ordinaire
La longueur de ce fil ; sinon je les tiens sûrs
De quelque semblable caresse.
Vous n’êtes point trompé : ce fou vend la sagesse.»
Je ne te puis donner un plus sage conseil.
Il n’est enseignement pareil
A celui-là de fuir une tête éventée.
On en voit souvent dans les cours :
Le prince y prend plaisir ; car ils donnent toujours
Quelque trait aux fripons, aux sots, aux ridiculesUn fol allait criant par tous les carrefours
Qu’il vendait la sagesse, et les mortels crédules
De courir à l’achat ; chacun fut diligent.
On essuyait force grimaces ;
Puis on avait pour son argent
Avec un bon soufflet, un fil long de deux brasses.
La plupart s’en fâchaient ; mais que leur servait-il ?
C’étaient les plus moqués ; le mieux était de rire,
Ou de s’en aller, sans rien dire,
Avec son soufflet et son fil.
De chercher du sens à la chose,
On se fût fait siffler ainsi qu’un ignorant.
La raison est-elle garant
De ce que fait un fou ? Le hasard est la cause
De tout ce qui se passe en un cerveau blessé.
Du fil et du soufflet pourtant embarrassé,
Un des dupes un jour alla trouver un sage,
Qui, sans hésiter davantage,
Lui dit :« Ce sont ici hiéroglyphes tout purs.
Les gens bien conseillés, et qui voudront bien faire,
Entre eux et les gens fous mettront pour l’ordinaire
La longueur de ce fil ; sinon je les tiens sûrs
De quelque semblable caresse.
Vous n’êtes point trompé : ce fou vend la sagesse.»
Eventée: Ecervelée.Trait: Attaque satirique.
Ridicule: Dans « Le Fou et la Sage » (cf. introduction), La Fontaine écrira Auprès des rois il est de pareils fous. / A vos dépens ils font rire le maître ».
Brasse: Longueur de deux bras étendus.
Que leur servait-il?: Dans « Le cochon, la Chèvre et le Mouton » (Livre VIII, fable 12, vers 30), nous trouvons le même hémistiche, exception faite du pronom : « Mais que lui servit-il ? ».
Bien conseillés: Bien avisés, bien inspirés.