Cette fable, inspirée par « La Vache, la Chèvre, la Brebis et le Lion » de Phèdre (I, V) est très proche par sa conclusion du « Loup et l’Agneau »; dans les deux, la raison du plus fort est bien sûr la meilleure. Dans « Le Loup et le Chien », le loup ne voulait aucun maître. Dans la pièce présente, la génisse, la chèvre et la brebis acceptent la protection d’un maître, ce qui est loin d’être un gage pour une vie meilleure.
La génisse, la chèvre et leur soeur la brebis,
Avec un fier lion, seigneur du voisinage,
Firent société, dit-on, au temps jadis,
Et mirent en commun le gain et le dommage.
Dans les lacs de la chèvre un cerf se trouva pris.
Vers ses associés aussitôt elle envoie.
Eux venus, le lion par ses ongles compta,
Et dit: « Nous sommes quatre à partager la proie ».
Puis, en autant de parts le cerf il dépeça;
Prit pour lui la première en qualité de sire:
« Elle doit être à moi, dit-il, et la raison,
C’est que je m’appelle lion :
A cela l’on n’a rien à dire.
La seconde, par droit, me doit échoir encor:
Ce droit, vous le savez, c’est le droit du plus fort.
Comme le plus vaillant, je prétends la troisième.
Si quelqu’une de vous touche à la quatrième,
Je l’étranglerai tout d’abord
Firent société: s’associèrent.
Le gain et le dommage: Les pertes et profits.
Les lacs sont des lacets tendus sur le passage du petit gibier pour le piéger par étranglement.
Par ses ongles compta signifie que le lion compte sur ses griffes. Ongle ou griffe du lion l’un et l’autre se dit. » (Richelet)
Je m’appelle lion: Voir Phèdre (I, V) « Je prends la première part parce que je m’appelle le Lion. »
Me doit échoir doit m’échoir.
Je prétends: Je revendique, je réclame.
Tout d’abord: Immédiatement.