Esope a écrit un texte très court, « Les Pots», que La Fontaine a eu tout loisir d’amplifier et de travailler selon son génie. Il utilise ici l’heptasyllabe (mêlé à l’alexandrin dans la dernière partie de la fable), ce qui confère à celle-ci un caractère sautillant. Collinet établit une comparaison entre le texte ci-dessous et le passage de l’Ecclésiastique, XIII, 2-3 « N’entrez point en société avec un plus riche que vous. Quelle union peut-il y avoir entre un pot de terre et un pot de fer ? Car lorsqu’ ils se heurteront l’un contre l’autre, celui de terre sera brisé. » (« La Fontaine – Œuvres complètes, tome I ; Fables, contes et nouvelles » édition établie, présentée et annotée par Jean-Pierre Collinet ; NRF Gallimard ; Bibliothèque de La Pléiade ; 1991, p. 1131). Mais le thème du récit a été repris et amplifié par bien d’autres auteurs, certains ayant pourvu le pot de terre de plus de prudence – et donc d’une plus longue vie – que chez La Fontaine.
Le pot de fer proposa
Au pot de terre un voyage.
Celui-ci s’en excusa,
Disant qu’il ferait que sage
De garder le coin du feu,
Car il lui fallait si peu,
Si peu, que la moindre chose
De son débris serait cause :
Il n’en reviendrait morceau.
« Pour vous, dit-il, dont la peau
Est plus dure que la mienne,
Je ne vois rien qui vous tienne.
-Nous vous mettrons à couvert,
Repartit le pot de fer :
Si quelque matière dure
Vous menace d’aventure,
Entre deux je passerai,
Et du coup vous sauverai. »
Cette offre le persuade.
Pot de fer son camarade
Se met droit à ses côtés.
Mes gens s’en vont à trois pieds,
Clopin-clopant comme ils peuvent,
L’un contre l’autre jetés
Au moindre hoquet qu’ils treuvent.
Le pot de terre en souffre; il n’eut pas fait cent pas
Que par son compagnon il fut mis en éclats,
Sans qu’il eût lieu de se plaindre .Ne nous associons qu’avecque nos égaux,
Ou bien il nous faudra craindre
Le destin d’un de ces pots .
Au pot de terre un voyage.
Celui-ci s’en excusa,
Disant qu’il ferait que sage
De garder le coin du feu,
Car il lui fallait si peu,
Si peu, que la moindre chose
De son débris serait cause :
Il n’en reviendrait morceau.
« Pour vous, dit-il, dont la peau
Est plus dure que la mienne,
Je ne vois rien qui vous tienne.
-Nous vous mettrons à couvert,
Repartit le pot de fer :
Si quelque matière dure
Vous menace d’aventure,
Entre deux je passerai,
Et du coup vous sauverai. »
Cette offre le persuade.
Pot de fer son camarade
Se met droit à ses côtés.
Mes gens s’en vont à trois pieds,
Clopin-clopant comme ils peuvent,
L’un contre l’autre jetés
Au moindre hoquet qu’ils treuvent.
Le pot de terre en souffre; il n’eut pas fait cent pas
Que par son compagnon il fut mis en éclats,
Sans qu’il eût lieu de se plaindre .Ne nous associons qu’avecque nos égaux,
Ou bien il nous faudra craindre
Le destin d’un de ces pots .
Ce que ferait un sage ; il ferait sagement. Locution archaïque.
De son débris: Action de se casser..
Il n’en reviendrait morceau: Pas le moindre morceau.
Qui vous tienne: qui vous retienne.
Entre deux: Entre vous deux.
A trois pieds: Comme les marmites qui avaient trois pieds.