(*) Voici le texte d’Horace « Un jour, un jeune renard, très mince, s’ était, par une fente étroite, glissé dans une jarre pleine de blé ; puis, bien repu et le corps tout rond, il essayait, mais en vain, de sortir. Une belette était près de là. « Si tu veux, lui dit-elle, partir d’ici, il te faut, maigre, franchir le petit trou par lequel maigre tu as passé. » (Horace, « Epîtres », livre III, vers 29-33, cité dans « Horace – Œuvres », traduction, introduction et notes par François Richard, GF – Flammarion, n° 159, 1967, p. 22
Entra dans un grenier par un trou fort étret :
Elle sortait de maladie.
Là, vivant à discrétion,
La galante fit chère lie ,
Mangea, rongea: Dieu sait la vie,
Et le lard qui périt en cette occasion!
La voilà, pour conclusion,
Grasse, maflue et rebondie.
Au bout de la semaine, ayant dîné son soûl,
Elle entend quelque bruit, veut sortir par le trou,
Ne peut plus repasser, et croit s’être méprise.
Après avoir fait quelques tours,
«C’est, dit-elle, l’endroit: me voilà bien surprise;
J’ai passé par ici depuis cinq ou six jours.»
Un rat, qui la voyait en peine,
Lui dit:« Vous aviez lors la panse un peu moins pleine.
Vous êtes maigre entrée, il faut maigre sortir.
Ce que je vous dis là, l’on le dit à bien d’autres.
Mais ne confondons point, par trop approfondir,
Leurs affaires avec les vôtres. »
Damoiselle: « Fille noble » selon l’Académie. Mot employé d’une manière parodique.
Flouet: Ancienne graphie pour fluet. Conservée ici pour la rime (en effet, le terme ‘étret’ du vers suivant se prononçait étrouet). Flouet était la forme habituellement reprise à l’époque (voir, par exemple, ‘L’Avare » de Molière, acte I, scène 4).
Etret: Etroit.
A discrétion: l’expression se dit des soldats vivant chez l’habitant et mangeant sans payer.
Galande ou galante: rusée.
Fit chère lie: De la même famille que ‘liesse’. Ne s’emploie que dans l’expression faire chère lie », c’est-à-dire faire un copieux repas.
Maflue: Pansue.
Soûl: Le texte initial écrit « son soû » qui signifie son soûl, son content.
Il faut maigre sortir: Voir dans l’introduction à cette fable, le texte d’Horace.
Allusion probable à la Chambre de Justice créé par Colbert en 1661 pour obliger les créanciers à rembourser certaines fortunes mal acquises.
Dans « Le Geai paré des plumes du Paon » (Livre IV, fable 9), nous trouvons « Je m’en tais, et ne veux leur causer nul ennui ; / Ce ne sont pas là mes affaires. »