Le Coq et la perle (Livre I – Fable 20)

Chez Phèdre (Livre III, 12), la fable est destinée à ceux qui comprennent mal (ou pas du tout) le poète. Chez le fabuliste latin, la perle représente le talent injustement méconnu. La Fontaine ajoutera quelques vers et fera de cette fable double une œuvre neuve et originale. On trouvera, dès 1669, soit quelques mois seulement après la parution des « Fables », un pastiche signé par Mme de Villedieu.

 

Un jour un coq détourna
Une perle qu’il donna
Au beau premier lapidaire.
« Je la crois fine, dit-il ;
Mais le moindre grain de mil
Serait bien mieux mon affaire. »Un ignorant hérita
D’un manuscrit qu’il porta
Chez son voisin le libraire
« Je crois, dit-il qu’il est bon ;
Mais le moindre ducaton
Serait bien mieux mon affaire.

Détourna: Mit à part lors de ses fouilles pour se nourrir.

Beau: Au tout premier lapidaire.

Fine signifie ici «vraie, de valeur ».

Serait…Certains écrivent ce vers – à tort – par « Ferait bien mieux mon affaire ». Par exemple, le « Dictionnaire alphabétique et analogique de la Langue française » de Paul Robert, tome deuxième, p. 1401 commet cette erreur au terme ducaton.

Les libraires faisaient à l’époque office d’éditeurs. Certains remplissent encore ce rôle de nos jours d’ailleurs.

Ducaton: Nom de monnaies européennes diverses en d’argent et de valeurs inégales mais assez fortes. Le ducaton valait un demi ducat. On appelait cette monnaie ainsi car elle était primitivement frappée à l’effigie des ducs de Venise. Mais on trouvait aussi des ducatons de Hollande ainsi que d’autres pays.