La Fontaine et les femmes

Son enfance et son adolescence l’avaient laissé loin des Amours. Enfermé dans l’Oratoire, sous la soutane, il se lança dans des lectures qui allaient faire de lui l’homme amoureux que l’on connaît. A la sortie de l’Oratoire, il se mit à fréquenter les cabarets, les auberges, les salons, le monde et le demi-monde. Il devint un habitué des cabarets, des salons bourgeois de Château-Thierry et des bordels (pour appeler les choses par leur nom !). Tout Château-Thierry le connaissait comme un coureur de jupons. Il était toujours bien vêtu, propre et faisait bonne impression, tant aux dames qui le trouvaient coquet qu’aux maris qui le trouvaient soigné et cultivé, et ne se méfiaient pas… Vers l’âge de 25 ans,  il connaissait très intimement bon nombre de servantes, de bergères et de femmes du monde de Château Thierry. Il se mit même un jour en tête de séduire la femme du lieutenant du roi de CT madame Rousselet. Il la surnomma Clymène et tenta de toutes les façons de la séduire. Rien n’y fit : Madame Rousselet ne lui céda pas. Pour vous en persuader, lisez donc, ou relisez Clymène, en songeant que La Fontaine se nomme Acante (Dans tous ses textes,quand La Fontaine parle d’Acante, comprenez que c’est de lui qu’il parle) et que Madame Rousselet est Clymène.CLYMENE
Vous reprenez toujours votre ton lamentable.
Oui, je vous veux aimer d’amitié malgré vous;
Mais si sensiblement que je n’aie, entre nous,
De là jusqu’à l’amour rien qu’un seul pas à faire.
ACANTE
Et quand le ferez-vous ce pas si nécessaire ?
CLYMENE
Jamais.

Toute la ville fut bientôt au courant de son échec, en particulier son père Charles qui, pour laver l’honneur de la famille, décida de le marier. Il lui présenta une toute jeune fille, fille d’un lieutenant criminel : Marie Héricart. Elle avait un peu plus de 14 ans au moment de leurs noces et apportait dans la corbeille une dot conséquente. Ce mariage fut un échec complet. Jean fut un bon amant et un mari attentionné les deux premières années de leur mariage, mais ses fréquents voyages à Paris l’éloignèrent de son épouse. Pour un libertin comme lui, la tentation de l’adultère était trop grande ! ! Très vite, il se désintéressa de sa femme. Son opinion du mariage se détériora rapidement. Relisez ce vers de Joconde pour vous en rendre compte : « Marié depuis peu: content, je n’en sais rien. » Son choix est donc fait : il préfère continuer à courir les jupons, à Paris ou à Château-Thierry. Amant de nombreuses femmes de passage, il fut, à son tour, comme de juste, plusieurs fois cocu. Mais cela ne le souciait guère. Voici ce qu’il dit sur le cocuage, dans la Coupe Enchantée :
Pauvres gens, dites-moi, qu’est-ce que cocuage ?
Quel tort vous fait-il ? Quel dommage ?
Qu’est-ce enfin que ce mal dont tant de gens de bien
Se moquent avec juste cause ?
Quand on l’ignore, ce n’est rien
Quand on le sait, c’est peu de chose.

Il entretenait même de bonnes relations avec quelques uns des amants de sa femme, considérant qu’elle était plus en sécurité avec eux lors de ses absences que seule dans la maison. Un de ces messieurs, le Capitaine Poignant, était même son ami personnel, et il l’encourageait même à venir chez lui. A ses retours de Paris, cela lui faisait, disait-il, quelqu’un à qui parler et avec qui boire…. Cette fois, il était allé trop loin. La ville de Château Thierry grondait et ne comprenait pas pourquoi il ne réagissait pas. Il était tellement désintéressé de sa femme que sa situation de cocu ne le préoccupait pas. Quand on lui rapporta son état de cocu, il répondit : « Ma foi, qu’il fasse ce qu’il pourra, je ne m’en soucie point. Il s’en lassera comme j’ai fait. » La pression de la ville le poussa à se battre en duel pour la ver son honneur. La Fontaine une épée à la main ? Vous imaginez ? ? Il fut blessé et battu au premier assaut. Une fois battu, il ramassa son épée tombée au sol, et repartit chez lui avec Poignant en lui disant : « J’ai fait ce que le public voulait, maintenant je veux que tu viennes tous les jours chez moi, sans quoi je me battrai encore avec toi