« Stultorum infinitus est numerus » – littéralement « le nombre des sots est infini ». Cette maxime latine, attribuée au roi Salomon, traverse les siècles sans perdre de sa pertinence. Bien plus qu’un simple trait d’esprit, elle résonne aujourd’hui comme une observation crue mais réaliste sur la nature humaine. À travers des anecdotes piquantes et des citations pleines d’ironie, certains auteurs du XIXe siècle en ont fait un thème récurrent pour dénoncer la bêtise collective.
L’orgueil d’un poète et la réplique qui tue : un exemple savoureux
Une anecdote illustre parfaitement cette sagesse populaire. Un poète, convaincu du génie de ses propres vers, les lit avec emphase à un auditeur qui, malheureusement pour lui, n’est pas impressionné. Blessé dans son amour-propre, l’auteur réplique : « Seuls les sots n’aiment pas ma poésie. » Ce à quoi son interlocuteur répond, imperturbable : « Stultorum numerus est infinitus. » La formule tombe comme un couperet. Autrement dit : si seuls les sots n’apprécient pas votre œuvre, et que leur nombre est infini, alors votre public est bien plus large que vous ne l’imaginiez — mais pas dans le sens espéré.
L’influence silencieuse mais massive de la médiocrité
Léon Peisse, critique littéraire du XIXe siècle, ajoutait une dimension plus stratégique à cette réflexion. Selon lui, bien qu’on n’écrive pas pour les sots, il serait peut-être judicieux de ne pas les négliger. Leur nombre, immense, leur donne une forme de pouvoir invisible. Cette majorité silencieuse influence les modes, les succès commerciaux et même les carrières. En d’autres termes, ignorer la masse des esprits moyens, c’est risquer l’échec, aussi brillant soit-on.
Une hiérarchie musicale dominée par la masse
Le musicologue Castil-Blaze utilisait cette même citation latine pour se moquer du monde musical de son époque. Il observait que la majorité des musiciens se contentaient de jouer des pièces faciles — des contredanses — sans jamais chercher à progresser. Le nombre de ces exécutants sans ambition écrasait littéralement celui des véritables artistes, qu’il plaçait en petits groupes : les virtuoses intermédiaires, les bons musiciens, puis les génies rares. À ses yeux, la musique, comme toute autre discipline, était dominée par une armée de médiocres.
Quand les institutions se choisissent elles-mêmes… mal
Dans un autre texte, Castil-Blaze allait encore plus loin. Selon lui, même les académies savantes n’échappaient pas à cette loi du grand nombre. Puisqu’elles sélectionnent elles-mêmes leurs membres, et qu’elles sont souvent influencées par des choix politiques ou des affinités personnelles, elles finissent inévitablement par privilégier la bêtise au détriment du talent. La maxime Stultorum numerus est infinitus devient alors un constat amer : la médiocrité se perpétue d’elle-même, par confort, par conformisme ou simplement par affinité intellectuelle.
Une leçon toujours d’actualité dans un monde numérique
À l’ère des réseaux sociaux et des débats publics instantanés, cette phrase latine n’a jamais été aussi actuelle. Le tumulte numérique amplifie les voix, sans faire le tri. Le « nombre infini des sots » ne se cache plus : il commente, partage, like et parfois domine les débats. Cela ne signifie pas que la majorité est nécessairement idiote, mais que la quantité de bruit peut parfois masquer la qualité du discours.
Tableau récapitulatif : les usages historiques de la formule
Auteur | Contexte | Sens de la citation |
---|---|---|
Anonyme | Réaction à une critique littéraire | Ironie sur l’auto-complaisance artistique |
L. Peisse | Réflexion sur le public | Importance stratégique de la médiocrité massive |
Castil-Blaze | Observation sur le monde musical | Hiérarchie dominée par les exécutants sans talent |
Castil-Blaze | Critique des académies | Sélection biaisée favorisant les esprits faibles |
Une maxime à méditer pour mieux comprendre notre époque
« Stultorum infinitus est numerus » n’est pas une moquerie gratuite, mais un avertissement lucide. Elle nous rappelle que la majorité n’est pas toujours un gage de qualité ou de sagesse. Dans un monde où l’information circule plus vite que jamais, cette petite phrase latine nous invite à garder notre esprit critique, à ne pas céder à la facilité du consensus, et à rester attentifs à ce qui brille vraiment sous la surface.
Qu’en pensez-vous ? Cette maxime est-elle toujours pertinente aujourd’hui ? Partagez votre avis ou une anecdote personnelle en commentaire !
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